La décision du Niger d'expulser le directeur local d'Areva prend un tour de politique internationale. Nicolas Sarkozy a annoncé vendredi qu'il envisageait de prendre une "initiative" dans "les jours qui viennent" pour régler le contentieux entre les autorités du Niger et le groupe nucléaire français. "Je ne voudrais rien dire qui complique une situation qui l'est déjà suffisamment, le Niger étant un pays important pour nous, puisque ce sont les principaux producteurs d'uranium militaire, d'où la présence d'Areva sur place", explique le président français.
Le Niger fournit environ 30% de l'uranium français. Ce pays est le troisième producteur mondial de ce minerai, base de l'industrie nucléaire. Areva est actif au Niger depuis quarante ans. Le groupe vient d'investir 700 milliards de francs CFA (environ 1,06 milliards d'euros) dans son site de production du nord-Niger. Il est le deuxième employeur local, derrière l'Etat. La production d'Areva ne serait pas affectée par la décision nigérienne.
Le Niger accuse le groupe nucléaire de financer la rébellion touareg dans le nord du pays, principale zone d'extraction d'uranium. Areva dément avec force tout soutien aux rebelles. "Les accusations formulées à l'encontre d'Areva sont infondées: l'argent versé par le groupe Areva était destiné à financer la protection de ses salariés", précise le groupe qui ajoute: "si cet argent a été partiellement détourné de ses fins, il l'a été aux dépens d'Areva". Le ministère des Affaires étrangère français s'est déclaré "surpris" par la décision du Niger.
Selon une source française contactée par la tribune.fr, l'affaire trouve son origine dans la désertion d'un officier nigérien qui aurait détourné une somme importante. Selon la même source, l'affaire doit aussi être analysée dans un contexte local, avec des élections proches. Les décideurs politiques nigériens seraient assez remontés contre Areva et la France.
Selon cette même source, l'accord signé par la France et la Libye, de fourniture d'un réacteur nucléaire pour la désalinisation de l'eau de mer, à la suite de la libération des infirmières bulgares, serait utilisé comme la preuve d'une collusion entre Areva et la Libye. Ces deux pays entretiennent des relations conflictuelles.
De leurs côté, les rebelles touaregs accusent les sociétés chinoises de prospection minière, qui s'intéressent de très près aux mines d'uranium nigériennes, de financer et équiper l'armée du pays. Ils avaient d'ailleurs enlevé, mi- juillet, un responsable chinois avant de le relâcher.
Pascal Junghans (La Tribune)
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