Par Emmanuel PARISSE
PARIS (AFP) - Le patron du groupe pétrolier français Total, Christophe de Margerie, était en garde à vue mercredi à Paris sur commission rogatoire du juge Philippe Courroye dans une affaire de corruption concernant un marché gazier en Iran.
L'information de la convocation de M. de Margerie a été révélée mercredi matin par le quotidien régional l'Est Républicain.
Selon des sources proches du dossier qui ont confirmé mercredi à l'AFP la convocation de M. de Margerie et son placement en garde à vue, les policiers financiers doivent interroger le haut-dirigeant sur le contrat signé en 1997 par Total avec la société pétrolière nationale iranienne NIOC pour l'exploitation d'un champ gazier appelé South Pars.
Deux autres responsables de Total, premier groupe français en terme de chiffre d'affaires et de capitalisation boursière, devaient également être entendus par les enquêteurs mercredi: le directeur financier Robert Castaigne et le patron de la filière gaz Philippe Boisseau.
Cette enquête avait été ouverte en décembre et avait été confiée aux juges Courroye et Xavière Simeoni.
Dans cette affaire, des fonds, dont la trace a été retrouvée en Suisse, auraient été versés de façon illicite par des dirigeants du pétrolier français à des décideurs iraniens, entre 1996 et 2003, en vue de s'assurer l'obtention du marché gazier iranien.
Près de 100 millions de francs suisses (60 millions d'euros) auraient transité sur deux comptes, selon la même source. Une partie de ces fonds, 9,5 millions d'euros, a été bloquée par les autorités helvétiques.
M. de Margerie était directeur Moyen-Orient à l'époque des faits.
Parallèlement, une information judiciaire a été ouverte début février pour "blanchiment" à la suite d'une enquête préliminaire ouverte le 8 janvier sur des soupçons de "corruption d'agents publics étrangers" dans l'exploitation et la commercialisation du pétrole au Cameroun.
Les investigations avaient été lancées, dans cette affaire pouvant viser potentiellement Total, à la suite d'une dénonciation en novembre 2006 de Tracfin, la cellule antiblanchiment du ministère de l'Economie et des Finances.
Les enquêteurs n'interrogeront pas M. de Margerie sur ce sujet, selon une source proche du dossier. A ce jour, ils disposent uniquement de soupçons sur des mouvements de fonds suspects sur le compte d'un fonctionnaire camerounais en France.
M. de Margerie et plusieurs autres dirigeants ou anciens dirigeants du groupe sont déjà mis en examen pour "complicité d'abus de biens sociaux et complicité de corruption d'agents publics étrangers" dans l'affaire "pétrole contre nourriture" également instruite par M. Courroye.
Des flux financiers issus du groupe pétrolier auraient été destinés à favoriser l'obtention de pétrole en Irak.
Dans ce dossier, le magistrat a découvert en 2005 que des Français étaient susceptibles d'avoir touché des commissions dans le cadre de violations de l'embargo onusien sur le pétrole imposé à l'Irak entre 1996 et 2003.
Le groupe Total a confirmé mercredi la convocation de M. de Margerie et de ses deux autres cadres, affirmant notamment que le groupe est "confiant dans le fait que la justice établira l'absence d'infraction".
Le juge Courroye, pour sa part, a été nommé cette semaine procureur de Nanterre, mais peut continuer d'instruire tant que son installation solennelle n'a pas eu lieu devant la juridiction des Hauts-de-Seine.
Commentaires