Un scandale vient de se déclencher en France, mettant à nu les méthodes du "géant" pour neutraliser ses concurrents, ce qu'il conteste.
Le président de la
République française est saisi du problème. Celui du Cameroun aussi. Le
courrier destiné à ce dernier lui a été transmis à l'hôtel
intercontinental de Genève où il réside depuis quelques jours. Nicolas Sarkozy et Paul Biya ont en effet reçu, respectivement le 07 et le 13 juin 2008, des lettres signées de Jacques Dupuydauby, Pdg de Progosa,
l'un des principaux concurrents du Groupe Bolloré dans le domaine de la
gestion portuaire en Afrique. Ces correspondances dont le ministre de
la Justice, Amadou Ali, a reçu copie, font référence à un livre intitulé "Allez-y, on vous couvre",
sorti officiellement le 12 juin dernier en France. Son auteur Patrick
Baptendier, un ancien gendarme devenu enquêteur privé, y raconte
notamment "Les liens qui existent entre des services de l'Etat, en l'occurrence la Dst, et les agences dites d'intelligence économique".
"J'ai
été directement victime de cet usage dévoyé. L'auteur m'a communiqué un
extrait de cet ouvrage où l'on peut lire, sous le chapitre 15, qu'en
2005, la société Geos (un spécialiste de l'intelligence économique, la
sécurité et la sûreté, et appartenant à Bolloré, Ndlr) lui a confié en
sous-traitance la mission d'espionner, notamment par voie d'écoute
illégales, l'un de mes collaborateurs, et de chercher dans son passé
des éléments susceptibles de lui nuire…", se plaint le Pdg de
Progosa dans sa lettre à Sarkozy. Lequel souligne que la Dst aurait
alors communiqué divers renseignements à caractère privé ou
confidentiel à l'enquêteur commis par le Groupe Bolloré, pour faciliter
l'exécution de sa mission.
Le but de la manœuvre est simple,
selon le rapport qui est fait à Jacques Dupuydauby : jeter l'opprobre
sur ce dernier et sur son collaborateur Gérard Perrier et… discréditer
Progosa en Afrique de l'Ouest, où la société impose une concurrence des
plus "farouche" au Groupe Bolloré.
"Les méthodes de Monsieur Bolloré sont indignes, et les moyens de pression qu'il utilise sont totalement inacceptables", écrit le Pdg de Progosa. Lequel indique au président français, pour l'image de la France en Afrique, "que
Monsieur Bolloré et ses collaborateurs cessent d'utiliser à tout propos
votre nom (Nicolas Sarkozy, Ndlr) pour impressionner les chefs d'Etats,
en vue notamment de faire classer les instructions judiciaires qui le
visent dans plusieurs pays pour des faits de corruption…".
Batailles
En tout cas, Jacques Dupuydauby dit avoir chargé son avocat, Me Jean-Pierre Mignard, de déposer plainte contre X en France, et demander réparation de "l'entreprise de déstabilisation de Progosa commanditée par le Groupe Bolloré", qui avait pour nom de code Nicodème. L'ex-gendarme auteur du livre est actuellement mis en examen pour "corruption, recel et complicité de violation de fichiers automatisés".
Nicolas Sarkozy, lui, devrait vite faire la lumière, à travers son
ministère de l'Intérieur, sur ce que la presse française appelle "les petits trafics de la Dst".
Mais la proximité du président de la République française avec Vincent
Bolloré, qui est de notoriété publique, fait peser des doutes sur la
poursuite sereine des enquêtes…
En fait, les correspondances
adressées à Paul Biya et Amadou Ali semblent avoir été commises à titre
d'information aux autorités camerounaises, pour décrier ce que Progosa
appelle "les méthodes du Groupe Bolloré". "Nous ne sommes pas
étonnés des agissements du patron de Progosa. Il s'agit d'une manœuvre
de plus dont nous ne sommes même pas sûrs que ce soit vrai", ont
laconiquement réagit les responsables du Groupe Bolloré cités par
certains journaux français. Selon le Groupe Bolloré en effet, Progosa
voudrait simplement "récupérer certains actifs développés par le Groupe Bolloré",
indiquent les mêmes sources. Le ping-pong juridico-économique semble
ainsi relancé entre les deux concurrents. Lesquels sont engagés dans
une guéguerre sans fin, qui remonte à un peu plus de quatre ans,
période où Jacques Dupuydauby travaillait encore avec le Groupe Bolloré
dans une activité de manutention en Afrique de l'Ouest.
Depuis
lors, les deux concurrents sont opposés devant les juridictions de
plusieurs pays d'Afrique, dont le Cameroun. Depuis novembre 2007, en
effet, Progosa a déposé plainte pour "corruption et favoritisme"
contre le Groupe Bolloré, lorsque ce dernier a remporté la concession
du Port autonome de Douala (Pad). A la suite de quoi, le Groupe
Bolloré, qui précise que la concession du port est gérée par un
consortium constitué de Maersk (actionnaire majoritaire qui a désigné
le directeur général du terminal), de Bolloré et de l'Etat du Cameroun,
a lui aussi saisi les tribunaux camerounais pour "diffamation".
Les deux procédures sont toujours en cours. Et les responsables locaux
du Groupe Bolloré, que nous avons joints hier pour obtenir leur point
de vue sur ce nouveau rebondissement, ont indiqué qu'il s'agissait
d'une campagne de presse dirigée contre le groupe, sur la base
d'extraits de l'ouvrage choisis à dessein et très souvent sortis de
leur contexte. Indiquant qu'ils réagiraient de manière opportune dans
les prochains jours.
Source : bonaberi.com et El Gosto
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