La recapitalisation sera concrétisée la semaine prochaine. Sauf impair de dernière minute, l’Etat sénégalais et les Indiens signeront un accord le mercredi 11 juillet. Les autorités sénégalaises font cependant montre de prudence, face au jeu de girouette auquel leur a habitué le partenaire asiatique.
L’Etat sénégalais et les travailleurs des Industries chimiques du Sénégal pourront bientôt pousser un ouf de soulagement. En effet, l’accord tant attendu pour la recapitalisation des Ics sera signé le mercredi 11 juillet, selon une source bien informée. Et tout porte à croire que les deux principaux actionnaires (Etat sénégalais et Iffco) ont fait des concessions pour arriver à un tel paraphe.
Du côté des autorités sénégalaises, on croise les doigts pour que les Indiens ne reviennent pas à nouveau sur leurs engagements. ‘Tout est fin prêt pour la signature d’un accord. Le seul problème qui se pose actuellement est la formulation d’un texte sur le site engrais, notamment la Senchim. Mais comme les Indiens ne s’intéressent pas trop aux activités liées à l’engrais, si tout se passe bien, la formulation d’un texte qui préserverait les intérêts des deux parties, ne devrait pas retarder la signature’, croit-on savoir du côté des autorités sénégalaises.
Le président Wade avait d’ailleurs souligné que le gouvernement a débloqué 70 milliards de francs de garantie pour éviter la faillite des Industries chimiques du Sénégal. ‘L’Etat va essayer de la (les Ics) sauver malgré le trou énorme. Ça nous coûtera de l’argent, ça va coûter cher, mais on va sauver les Ics’, avait déclaré, en janvier dernier, le chef de l’Etat. Ce dernier devrait donc prier pour que l’accord aboutisse le 11 juillet prochain, selon le calendrier retenu par les deux parties. ‘Aujourd’hui, on prie que les choses aboutissent le plus vite possible. Mais avec les Indiens, on ne sait pas toujours ce qui adviendra du jour au lendemain. Ils sont souvent comme la girouette. Nous espérons que cette fois-ci sera la bonne’, prie un officiel sénégalais.
Pour le paraphe de cet accord sur la recapitalisation des Ics, la délégation indienne est attendue à Dakar en début de semaine prochaine. Des sources dignes de foi informent que la signature se fera en présence du Premier ministre Cheikh Hadjibou Soumaré. Une cérémonie qui sera suivie d’un point de presse et d’une audience avec le chef de l’Etat.
C’est à la veille de la présidentielle du 25 février dernier que les deux parties s’étaient engagées à sauver les Ics. C’est ainsi que le plan de recapitalisation devait nécessiter la réduction et la restructuration de la dette des Ics et l’injection par les Indiens d’un minimum de 40 milliards de francs en numéraires avant le 30 juin 2007. Une échéance qui n’a pas été respectée du fait des réglages que devaient opérer les deux parties.
A cette occasion, Iffco, le principal partenaire des Ics, s’était engagé à continuer de soutenir les Ics, en garantissant les importations d’intrants, ainsi que les engagements pris par la société auprès des armateurs internationaux. Cette décision d’Iffco a aussi permis aux Industries chimiques du Sénégal de continuer son exploitation, avec actuellement un programme de production de deux bateaux d’acide phosphorique exportés tous les mois en Inde.
En février 2006, les Ics avaient sollicité auprès du président du tribunal régional hors classe de Dakar, leur admission au régime du règlement préventif prévu par l’Acte uniforme de l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (Ohada) sur les procédures collectives d’apurement du passif, afin de sécuriser leur patrimoine face aux créanciers. Et, pour présenter au président du Tribunal régional hors classe de Dakar, le juge Demba Kandji, un concordat préventif acceptable par les créanciers, les deux parties, après plusieurs séries de négociations, avaient convenu que la dette bancaire locale et la dette commerciale des Ics pourront faire l’objet d’une titrisation. Parallèlement, un plan de recapitalisation tel qu’exigé par la réglementation de l’Ohada et la juridiction sénégalaise sera finalisé par l’Etat du Sénégal et le groupe indien.
L’Etat du Sénégal et Iffco ont ensuite continué de travailler ensemble pour rendre supportable par les activités de l’entreprise, l’impact de la dette locale et internationale des Ics, en sollicitant auprès des créanciers, des banques locales et des bailleurs de fonds, des abandons de créances et un rééchelonnement de cette dette. D’ailleurs, le communiqué conjoint sanctionnant les négociations de février dernier devait être soumis au président du Tribunal régional hors classe de Dakar, aux actionnaires, aux créanciers, pour confirmer la volonté des parties d’assurer, dans le respect de l’Acte uniforme Ohada applicable en la matière, la poursuite des activités des Ics.
L’emprunt obligataire a été une épine pour les Ics. En effet, c’est pour le paiement de cet emprunt que la société Offnor, dont Jérôme Godart est mandataire, a été sollicitée. Le contentieux avec les Ics avait amené ce dernier à effectuer des saisies conservatoires sur les comptes des Ics.
Offnor avait signé des contrats d’approvisionnement pour plus de 30 millions de dollars américains (environ 16 milliards) et ouvert des lettres de crédit en faveur des Ics. Ces lettres de crédit permettaient aux Ics de rembourser l’emprunt obligataire contracté auprès de la bourse d’Abidjan. Et la fin 2005 coïncidait avec l’échéance de l’emprunt obligataire (2002-2005, à 7 %) de 10 milliards de francs Cfa que les Ics avaient lancé en mars 2002 sur le marché financier sous-régional dans le cadre d’un programme d’investissements de 165 milliards. Un programme destiné à doubler la capacité de production d’acide phosphorique et la mise en exploitation d’un nouveau gisement de phosphate à Tobène, devait être autofinancé à hauteur de 50 %.
Depuis l’année dernière, après diagnostic de la situation, quatre conditions ont été mises sur la table. Il s’agit de l'acceptation des banques locales, auxquelles les Ics doivent 70 milliards (le total de la dette est estimé à 225 milliards de francs), d'étaler la dette sur cinq ans ; la levée du compte séquestre de 10 à 12 milliards pour permettre à l'entreprise d'améliorer sa trésorerie ; la recapitalisation de la société. Et enfin que les membres internes de la boîte parviennent, par des niches d'économie, à améliorer la situation d'ici cinq ans pour économiser 99 milliards de francs.
Johnson MBENGUE (Walf)
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