Le groupe français Bolloré, présent au Sénégal depuis 80 ans, contre-attaque en déposant un recours et veut des explications après avoir perdu la concession du terminal à conteneurs du port de Dakar au profit de Dubaï Ports World, un des leaders mondiaux de la gestion portuaire.
"Un recours administratif a été introduit auprès du ministère de tutelle, le ministère (sénégalais) de l'Economie maritime, avec copie à la présidence de la République", a-t-on indiqué vendredi au siège du groupe Bolloré à Dakar, confirmant une information parue dans le quotidien parisien Les Echos. Mais "ce recours n'est pas suspensif", a précisé cette source, qui s'exprime sous couvert de l'anonymat. La date du recours n'a pas été précisée. Le 5 juin, l'opérateur portuaire de Dubaï, Dubaï Ports World, avait annoncé avoir obtenu une concession pour développer et exploiter l'actuel terminal à conteneurs de Dakar, un des principaux d'Afrique de l'ouest, et investir dans un nouveau. "On avait le dossier le mieux ficelé, l'offre la plus séduisante, on avait le potentiel pour gagner. Mais on nous a dit qu'on a été disqualifié, exclu de l'appel d'offres", indique une source proche de la direction du groupe Bolloré à Dakar. "On avait soumissionné comme tout le monde. Mais après, on nous a envoyé un courrier disant qu'on a été disqualifié. On veut savoir pourquoi. On dénonce un manque de transparence. Cette décision menace la présence du groupe au Sénégal et fait douter tous les grands groupes français ici", selon cette source. Le directeur général du groupe Bolloré au Sénégal Francis Jean a demandé une audience auprès du chef de l'Etat Abdoulaye Wade, selon cette source. Le chef de l'Etat sénégalais a rencontré lundi à Paris le président Nicolas Sarkozy. Très présent en Afrique, le groupe Bolloré est installé depuis 1926 au Sénégal, ancienne colonie française indépendante depuis 1960, et emploie quelque 1.200 personnes. La branche manutention au port représente plus de 40% du chiffre d'affaires du groupe au Sénégal, où il est aussi présent dans la logistique, le transit, le stockage, le tourisme, le courrier express et le déménagement. Selon cette source proche du groupe, environ 500 emplois sont menacés au port à la suite de la décision d'octroyer la gestion à la société de Dubaï. Lundi matin, des dockers travaillant pour la manutention et craignant pour leur avenir ont observé un sitting de quelques heures, perturbant légèrement l'activité au niveau des conteneurs. Du côté sénégalais, on souligne au contraire la "transparence" de l'appel d'offres. "J'ai reçu le recours (de Bolloré). Il n'y a pas de délai pour répondre. Mes services sont en train de l'étudier", a indiqué vendredi à l'AFP le ministre de l'Economie maritime Djibo Kâ. Il a refusé de répondre sur le fond du dossier, soulignant qu'il aborderait ce sujet dans sa réponse au groupe Bolloré. "Ce qui est important, c'est la transparence. C'est le fondement de l'appel d'offres. Nous avions exclu que cela soit de gré-à-gré", a-t-il insisté. "Je suis formel, il n'y a aucun doute sur la transparence (de la procédure)", a poursuivi le ministre. Le groupe Bolloré "est un de nos partenaires les plus sérieux, les plus anciens. Mais on est dans une économie mondiale ouverte, avec une concurrence internationale. Ce qui m'intéresse, ce sont les intérêts du Sénégal", a-t-il insisté. "Notre ambition est de faire du port de Dakar un véritable hub", en le faisant passer "en cinq ans" de 300.000 conteneurs/an à un million, a-t-il précisé. Il s'agit d'une "question technique, financière, économique mais pas une question politique, cela n'a rien à voir avec la politique politicienne", a-t-il affirmé, avant de conclure: "il ne faut pas créer des tensions là où il n'y en a pas". | |
Auteur: Journaldunet.com |
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