La police a intercepté, à Nouadhibou, 630 kilos de drogue ; le fils d'un ancien président serait impliqué. Un avion privé, des hélicoptères, d'importantes sommes de devises, plu d'une demi-tonne de cocaïne et un vaste réseau international.
A pein installé, le nouveau pouvoir du président de Mauritanie, Sidi Ould Cheik Abdallahi, issu de la transition démocratique achevée en Mauritanie fin avril est confronté à sa première épreuve. Parmi les principaux protagonistes d l'affaire figurent le fils d'un ancien président, le chef d'un parti de gauche e cousin par alliance de l'actuelle famille présidentielle, et plusieurs fils de «grandes tentes», comme on appelle les grandes familles dans cett ancienne colonie française. Cerveau présumé de l'affaire, Sidi Mohamed Oul Haidalla, le fils aîné du colonel Haidalla qui a dirigé le pays dans les année 80, est en fuite, probablement à l'étranger, selon la police.
Tuyau. L'affaire a éclaté dans la nuit du 1er au 2 mai. Alertés par le tuyau d'un indic, les policiers investissent l'aéroport de Nouadhibou. Ils pensent mettre la main sur un petit avion Cessna 441 Conquest, qu'ils soupçonnent de récupérer de la cocaïne entreposée par un réseau international de trafiquants. Ils découvrent que l'appareil est venu en débarquer. L'équipage parvient à leur échapper, mais en laissant une vingtaine de cartons contenant au total 630 kg de coke. A l'aube, l'avion est localisé 125 km plus loin, en plein désert, où il a été contraint de se poser, sans doute faute de carburant. Les enquêteurs pensent que les trois personnes qui se trouvaient à bord deux pilotes belges avec lesquels le principal suspect avait pris place au moment de leur fuite auraient trouvé refuge au coeur du Sahara-Occidental sous contrôle du Front Polisario.
Selon la police, l'appareil venait du Venezuela, via Recife au Brésil. Pour parcourir les 4 800 km séparant Recife de Nouadhibou, sans avoir besoin de faire escale, l'équipage avait désossé l'intérieur de l'avion pour y entasser 33 bidons de 90 litres de carburant et assurer le ravitaillement en plein vol. La cargaison devait être déposée à Nouadhibou, et stockée dans une ancienne usine de pêche achetée dernièrement pour deux millions d'euros cash par le cerveau présumé de l'opération, avant d'être réexpédiée. Deux hélicoptères, arrivés la veille et pilotés par des Français, devaient assurer cette ultime étape.
Sept personnes, dont les deux Français, ont été inculpées et incarcérées en Mauritanie. Quant à l'homme politique cité dans cette affaire, Chbih Ould Cheikh Melainine titulaire d'un «passeport pour la liberté», décerné en 2003 par le Parlement européen, alors qu'il était emprisonné par l'ancien dictateur Maaouya Ould Taya (déposé par l'armée en 2005) , il a d'abord été interpellé à cause de ses liens avec le cerveau présumé et les deux pilotes belges de l'avion, mais son cas a été classé sans suite. «Le pays est devenu depuis des années une des plus importantes plateformes de toutes sortes de trafic, allant de l'émigration clandestine aux cigarettes, en passant par les voitures haut de gamme volées en Europe, et bien entendu la drogue, explique Abdallah ben Ali, journaliste à Jeune Afrique et spécialiste de la Mauritanie . Or nombre de hauts responsables des forces de sécurité doivent leur train de vie luxueux aux services qu'ils assurent aux différents réseaux mafieux, surtout durant les vingt dernières années, où l'ancien régime avait érigé la corruption et l'enrichissement facile au stade de valeurs nationales suprêmes . »
Interpol. S'il est le premier mettant en cause des hautes personnalités en Mauritanie, le scandale de Nouadhibou est loin d'être la seule affaire de trafic de drogue. En 1996, signalé par Interpol, un navire danois transportant près de 7 tonnes d'héroïne, pour un montant de 500 millions de dollars, avait été arraisonné dans le port de Nouakchott. En 2002, partie de Nouadhibou, son port d'attache, une puissante vedette était interceptée par une patrouille franco-espagnole, alors qu'elle s'apprêtait à récupérer 2 tonnes de cocaïne d'un navire en provenance d'Amérique latine. En 2006, un groupe de jeunes Mauritaniens a détourné en pleine mer un cargo colombien contenant plus de 8 tonnes de cocaïne. Personne n'a jamais été condamné dans ces affaires.
Par M. Lemine OULD SALEM (Liberation.fr)
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