Liquidée, Air Afrique l’est depuis 2002. Et avec elle, ses 4000 employés. Moins les 401 déjà morts de n’avoir toujours pas perçu leurs indemnités et arriérés. Depuis 2002 aussi, comme par hasard, Air France règne sur le ciel africain. A des tarifs scandaleux. Et en utilisant, Le Gri-Gri le prouve, la « valeur marque » de la défunte Air Afrique.
Petit rappel des tragiques faits. 1961, une dizaine de gouvernements africains unissent leurs forces et, avec l’appoint et l’appui d’Air France, créent Air Afrique, dont le siège se trouvait à Abidjan. 1987-1988, sur injonction du premier Ministre français, Michel Roccard, le président ivoirien Houphouët-Boigny et les chefs d’Etats africains de la multinationale sont obligés d’accepter la nomination d’un nouveau président d’Air Afrique choisi hors des Etats membres. Ce sera Yves Roland Billecart (YRB pour les intimes), Directeur général de la Caisse centrale de coopération économique (CCCE, actuelle Alliance française pour le développement).
Ses idées de restructuration ? Compression des effectifs ; réorganisation de la gestion ; modernisation de la flotte. 1990 : YRB commande 4 Airbus A-310-300. Appareils coûteux ne correspondant pas aux besoins de la compagnie déjà plus très africaine... Suite au rachat d’UTA par Air France, celle-ci devient actionnaire « privilégié et majoritaire » d’Air Afrique à hauteur de 27%. L’achat injustifié des 4 Airbus pèsera lourdement sur les résultats d’exploitation. Comme prévu. Comme souhaité... Tout comme la dévaluation du Franc CFA en 1993 et une suite de mesures, décisions et choix durant les années 90-2000.
Air Afrique décline. 2002 : le tribunal de commerce d’Abidjan déclare la liquidation d’Air Afrique. 4000 employés sur le carreau. Début du monopolistique règne d’Air France sur les cieux africains. Dans sa précédente édition (N°72, du 10 mai 2007), Le Gri-Gri attirait l’attention de ses lecteurs sur la mort de 400 des 4000 employés non indemnisés depuis 2002.
Le Gri-Gri s’est procuré la preuve - un ticket de bagages « Air Afrique » collé sur le billet « Air France » et déjà transmis à la Justice - que Air France continue d’utiliser le nom « Air Afrique » à son seul usage. Alors même que la compagnie africaine est déclarée liquidée... Un « nom commercial » ou une « valeur marque » évalué à plusieurs millions de dollars qu’Air France utilise sans l’avoir (r)acheté au liquidateur. « Nom commercial » qui ajoute incontestablement à la valeur du billet Air France par son poids symbolique et quasi-subliminal (sinon, pourquoi l’utiliser ?). Il en irait de même d’une partie du matériel d’Air Afrique, réservé au seul et peu coûteux usage d’Air France. Face au refus d’Air France de nous répondre, nous nous sommes adressés au cabinet d’avocats parisien Brane, qui défend les employés d’Air Afrique regroupés au sein de la Confédération régionale pour l’amélioration des conditions de vie et de travail du personnel de la compagnie aérienne (Cracvt-Pca) :
« Il s’agit purement et simplement d’un détournement d’actifs de la société Air Afrique. Nous nous étonnons que le liquidateur d’Air Afrique n’ait pas déjà entamé de procédure. Nous sommes résolus à le faire en France. » A suivre.
Source: Nettali
© Gri-Gri international) : Grégory Protche
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