Porter Goss, directeur depuis deux ans de l'agence de renseignement américaine, a présenté sa démission.
Moins de deux ans après sa nomination en septembre 2004, Porter Goss, directeur de la CIA, l'Agence centrale de renseignement américaine, a démissionné vendredi 5 mai. C'est le dernier remaniement en date au sein de l'administration Bush.
Le président George W. Bush a fait cette annonce à la Maison Blanche, en présence de Porter Goss dont il a salué le travail. Pas plus que M. Goss, M. Bush n'a donné d'explications sur ce départ, ni annoncé dans l'immédiat le nom de son successeur à la tête des services secrets américains.
"Ce matin, Porter Goss m'a présenté sa démission, que j'ai acceptée (...) Il a dirigé avec compétence", a déclaré M. Bush, notant que Porter Goss a lancé durant son mandat de "transition" un programme sur "cinq ans pour augmenter le nombre d'analystes et d'agents, ce qui aidera à faire de ce pays un endroit plus sûr et nous aidera à gagner la guerre contre le terrorisme".
Conflit ouvert
Porter Goss, 67 ans a été nommé en septembre 2004 alors que la CIA, en pleine tempête, était vivement critiquée pour son traitement du renseignement tant en matière de terrorisme que dans l'affaire irakienne. Mais le nouveau patron de la centrale s'est attiré d'entrée les foudres du personnel de la vénérable institution.
Au fil des semaines et des mois, nombre de responsables de l'agence, en conflit ouvert avec les conseillers de Goss jugés trop politiques, ont préféré démissionner -ou ont été poussés vers la sortie-, parfois après des décennies d'ancienneté dans la maison. En septembre 2005, c'est le numéro deux des services secrets, Robert Richer, qui avait ainsi jeté l'éponge.
Ancien député de Floride, directeur de la Commission du renseignement de la Chambre des Représentants et agent de la CIA, Porter Goss entretenait en particulier de mauvaises relations avec des responsables des services de l'action clandestine de l'agence. Jane Harman, membre démocrate de la Commission parlementaire du renseignement, soulignait récemment que la CIA était "en chute libre", déplorant la démission de cadres et agents combinant 300 ans d'expérience.
Irak et prisons secrètes
La fuite dans les médias d'informations sur l'Irak et les prisons secrètes de la CIA en Europe de l'Est a par ailleurs pu jouer un rôle dans le départ de M. Goss. Fait hautement inhabituel, il avait annoncé il y a deux semaines le renvoi d'un analyste en relation avec ces fuites. D'après un haut responsable de l'administration Bush, le directeur national du renseignement John Negroponte s'était entretenu avec Porter Goss, avec le feu vert de la Maison Blanche, pour évoquer avec lui la question d'une éventuelle démission.
La vaste réforme adoptée par le Congrès en décembre 2004 a fait perdre à la CIA sa place prépondérante parmi les 16 agences du renseignement américain, au profit du directeur national du renseignement. Porter Goss, selon un responsable du renseignement qui a requis l'anonymat, ne voyait pas cette situation d'un bon oeil. Il voulait que la CIA "reste, comme son nom l'indique, l'Agence 'Centrale' de Renseignement", a ajouté le responsable.
La démission de M. Goss s'inscrit dans le cadre d'un vaste remaniement de l'équipe Bush. A quelques mois des élections législatives de novembre, le président américain, au plus bas dans les sondages, tente de reprendre la main pour sauver son deuxième et dernier mandat.
Départs
Le secrétaire général de la Maison Blanche Andrew Card, le porte-parole présidentiel Scott McClellan et le responsable des négociations commerciales internationales ont entre autres été remplacés, tandis que Karl Rove, éminence grise de M. Bush, a perdu ses attributions en matière de coordination des actions politiques de la Maison Blanche. Certaines informations, en outre, font état du prochain départ du secrétaire au Trésor John Snow.
D'après un haut responsable de l'administration Bush, la nomination du successeur de Porter Goss pourrait intervenir dès lundi. Les noms de Frances Fragos Townsend, conseillère de M. Bush pour la sécurité nationale, David Shedd, chef de cabinet de John Negroponte et Mary Margaret Graham, adjointe de M. Negroponte chargée de la collecte du renseignement, sont notamment cités. (AP)
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