02 octobre 2005 (Reuters - 11:50)
par Darren Whiteside et Achmad Sukarsono
BALI, Indonésie - Les premiers éléments de l'enquête sur les attentats de samedi à Bali laissent penser que des kamikazes sont à l'origine des trois explosions qui ont fait au moins 26 morts et plus de 120 blessés, a annoncé le chef des services antiterroristes indonésiens.
Prié de dire s'il s'agissait d'attentats suicide, Ansyaad Mbai a déclaré dimanche à Reuters: "Les éléments vont dans cette direction. Nous avons retrouvé des corps décapités et tous étaient dans le secteur des explosions."
Le président indonésien, Susilo Bambang Yudhoyono, attendu dimanche à Bali, a qualifié ces attentats d'acte de terrorisme. "Nous arrêterons les auteurs et nous les punirons", a-t-il promis, ajoutant cependant qu'il était trop tôt pour se prononcer sur l'identité des auteurs des attentats.
Mais, de l'avis des experts, ces actions portent la marque de la Jemaah Islamiah, allié régional du réseau Al Qaïda, à laquelle avaient été imputés les attentats sanglants du 12 octobre 2002 sur l'île indonésienne. Ce jour-là, 202 personnes dont 88 touristes australiens avaient trouvé la mort dans deux boîtes de nuit de Kuta Beach.
"C'ETAIT LE CHAOS"
Samedi, cette plage balinaise a de nouveau été choisie pour cible par les poseurs de bombe, qui ont également frappé la plage de Jimbaran. Les trois bombes ont explosé pratiquement au même moment. A cette heure de la soirée, les deux restaurants de fruits de mer et le bar visés étaient pleins.
"Nous mangions lorsque tout à coup tout est devenu sombre. J'ai tenté de m'éloigner en courant mais je n'arrêtais pas de tomber. Et puis la seconde explosion s'est produite. Les gens paniquaient. J'ai seulement essayé de sauver ma peau", témoigne Ketut Suartana, un trentenaire rescapé d'un des deux attentats le long de la plage de Jimbaran.
"C'était la panique, tout le monde essayait de fuir, j'ai vu des membres de corps humains, des têtes, c'était le chaos", raconte pour sa part Wayan Jipang, un guide touristique de 33 ans.
A l'hôpital Sanglah de Bali, 26 dépouilles mortelles ont été comptabilisées. Seize d'entre elles ont été identifiées: douze Indonésiens, dont un enfant de six ans, trois Australiens et un Japonais.
Parmi les blessés figurent une soixantaine d'Indonésiens, 20 Australiens, sept Sud-Coréens, quatre Américains, trois Japonais, une Française, un Allemand et d'autres ressortissants étrangers dont la nationalité n'a pas été communiquée.
Le Premier ministre australien, John Howard, a estimé que le bilan pourrait s'alourdir à 30 morts. D'après lui, les auteurs de ces attaques avaient pour objectif d'affaiblir "l'Indonésie démocratique en tant que pays musulman modéré" et de viser "les Occidentaux".
Pour Agung Laksono, président du parlement indonésien, ces attentats "mettent en question le travail des services de renseignement".
L'AUSTRALIE À NOUVEAU ENDEUILLEE
Sur les lieux des attentats, les images de télévision tournées peu de temps après les déflagrations montrent des étrangers apeurés errant dans les rues, des blessés indonésiens sont assis sur les trottoirs. Les rues adjacentes sont jonchées de verre, le sol recouvert de sang.
Les images rappellent celles de la tragédie d'octobre 2002, dont l'industrie touristique commençait à peine à se remettre. Située à un millier de kilomètres à l'est de Djakarta, Bali est la plus fréquentée des destinations touristiques de l'Indonésie.
Dès dimanche, les autorités australiennes ont recommandé d'éviter les déplacements en Indonésie. "La possibilité de nouveaux attentats ne peut être exclue", souligne le gouvernement.
La compagnie aérienne australienne Qantas a annoncé qu'un de ses appareils acheminerait dimanche des équipes médicales et de sécurité. Il rapatriera au retour des touristes australiens séjournant actuellement dans l'île.
Les autorités indonésiennes, ainsi que les Etats-Unis et l'Australie, mettaient en garde depuis plusieurs mois contre le risque d'attentats islamistes dans le plus grand pays musulman au monde, en dépit de l'arrestation de cadres présumés de la Jemaah Islamiah.
"Si vous regardez la totalité des précédents attentats de la Jemaah et les interrogatoires de suspects, nous savons que ses membres considéraient les attentats de Bali (d'octobre 2002) comme leur seul succès véritable. J'imagine donc qu'ils ont tenté de le rééditer", observe Ken Conboy, expert en matière de sécurité et de défense basé à Djakarta.
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