LONDRES (AP) - Dans les pays en développement, huit personnes porteuses du virus du SIDA sur dix ignorent qu'elles sont contaminées. Pour mieux identifier les millions de personnes qui ont besoin d'un traitement dans le monde, l'OMS et l'ONUSIDA recommandent désormais aux professionnels de santé de prendre l'initiative de proposer des tests de dépistage, plutôt que d'attendre que le patient le demande.
L'Organisation mondiale de la santé (OMS) et le Programme commun des Nations unies sur le VIH/SIDA (ONUSIDA) ont publié mercredi un "Guide du conseil et du dépistage du VIH à l'initiative du soignant dans les établissements de santé".
"Aujourd'hui, environ 80% des personnes vivant avec le VIH dans les pays à revenu faible ou intermédiaire ignorent qu'elles sont séropositives", rappellent l'OMS et l'ONUSIDA dans un communiqué. "Selon des enquêtes récentes en Afrique subsaharienne, seulement 12% des hommes et 10% des femmes en moyenne ont eu un test de dépistage et reçu le résultat."
Jusqu'à tout récemment, c'était essentiellement au patient de demander à subir un test de dépistage. Mais la pratique du dépistage à l'initiative du patient s'est heurtée "à la faible disponibilité des services, à la peur de la stigmatisation". Par ailleurs, de nombreuses personnes ont l'impression de ne pas être exposées au risque de contracter le VIH, alors même qu'elles vivent dans des zones où l'épidémie est forte.
"Les données actuelles montrent aussi qu'on laisse passer de nombreuses occasions de diagnostiquer l'infection à VIH dans les milieux médicaux, même en cas de forte épidémie", note le communiqué de l'OMS et l'ONUSIDA.
Le nouveau guide préconise que les professionnels de santé dans le monde entier recommandent le conseil et le dépistage du VIH aux patients qui présentent des pathologies évocatrices d'une infection à VIH sous-jacente. Mais "en cas d'épidémie généralisée", l'OMS et l'ONUSIDA pensent qu'ils doivent être recommandés à "tous les patients fréquentant les établissements de santé, qu'ils aient ou non des symptômes de l'infection et quelle que soit la raison pour laquelle ils sont venus".
En cas d'épidémies "concentrées ou peu étendues", elles préconisent de le recommander systématiquement dans certains établissements ou services (soins prénatals, tuberculose, santé sexuelle et de la reproduction...). L'OMS et l'ONUSIDA stipulent que tout dépistage doit être volontaire, confidentiel et réalisé avec le consentement du patient.
Reste à savoir comment les pays les plus pauvres d'Afrique, qui comptent le plus de malades du SIDA, vont pouvoir mettre ces recommandations à pratique. Sur les quelque 40 millions de personnes qui vivent avec le VIH dans le monde, selon les estimations, près de 65% se trouvent en Afrique. En Afrique sud-saharienne, près de cinq millions de personnes n'ont toujours pas accès à un traitement.
"Personne ne veut une situation où les gens découvrent qu'ils sont séropositifs mais ne peuvent pas obtenir d'antirétroviraux", reconnaît Jennifer Kates, vice-présidente et directrice de la politique VIH pour la Fondation américaine Kaiser Family. "Mais si on attendait que tout soit parfaitement en place, on ne pourrait jamais agir."
En outre, toutes les personnes qui se révèlent séropositives n'ont pas besoin immédiatement d'un traitement médicamenteux. Et les études montrent que lorsque les personnes savent qu'elles sont séropositives elles ont davantage des rapports sexuels protégés.
Mais la faiblesse du réseau de santé en Afrique reste un obstacle à la mise en oeuvre des recommandations de l'OMS. Le continent a besoin d'urgence de quelque quatre millions de soignants supplémentaires, reconnaît l'OMS.
Cela dit, les nouvelles consignes permettront aussi de diagnostiquer la maladie plus tôt. "Le plus gros problème que nous avons aujourd'hui c'est que nos systèmes de santé sont surchargés de personnes très malades qui arrivent trop tard", souligne Zackie Achmat, président de la Campagne Traitement Action en Afrique du Sud. AP
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