Tous les observateurs internationaux, lors du vote, l'ont confirmé. Marqué par des violences et des morts, des fraudes et des cafouillages innombrables, le scrutin de samedi n'a été ni libre ni équitable. L'élection s'est déroulée dans des conditions pires que celles de 1999 et de 2003, a fait observer l'International Republican Institute (IRI), un organisme américain, proche du Parti républicain, qui avait dépêché sur place des observateurs. Les représentants de l'Union européenne et des organisations africaines n'ont pas été plus convaincus. Forts de ce rendez-vous manqué, les deux principaux candidats de l'opposition, le vice-président Atiku Abubakar et le général Muhammadu Buhari, ont déjà annoncé qu'ils n'acceptaient pas les résultats du scrutin.
Cela n'augure rien de bon pour le Nigeria, alors que le pays aurait besoin de stabilité pour espérer sortir du sous-développement. Car, en dépit de ses ressources pétrolières et gazières, qui en font le premier producteur africain d'hydrocarbures, le Nigeria souffre, jusqu'à la caricature, des maux du continent noir : trois habitants sur quatre vivent avec moins d'un dollar par jour, tandis qu'une minorité de privilégiés étale son luxe.
Un homme porte une responsabilité écrasante dans ce gâchis électoral, porteur de bien des dangers : c'est le président sortant, Olesegun Obansanjo. Elu en 1999, réélu en 2003, il n'a eu de cesse, depuis deux ans, faute de pouvoir solliciter un troisième mandat, de mettre des bâtons dans les roues de ses opposants et de tout faire pour assurer la victoire de ses amis politiques.
Les élections locales du 14 avril avaient donné la mesure du chaos engendré par cette politique du pire. Elles furent des caricatures de scrutin. Celles de samedi, boycottées par une large partie de la population, n'auront pas valu mieux. Elles vont sans doute permettre au président sortant d'installer son dauphin à la présidence, et ainsi de continuer à tirer les ficelles du pouvoir. Le Nigeria méritait mieux. L'Afrique aussi.
Source: LE MONDE
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