PEKIN - Malgré les attaques dont sont victimes ses ressortissants en Afrique, la Chine, à l'image du géant pétrolier Sinopec, n'envisage pas un retrait d'un continent aux ressources essentielles pour nourrir sa croissance économique. "Nous avons lancé un plan d'urgence et alerté tous nos sites à l'étranger pour qu'ils fassent plus attention à la sécurité. Mais il n'est pas question d'arrêter des projets ou de changer de stratégie", a dit jeudi à l'AFP, sous couvert de l'anonymat, un responsable de Sinopec.
C'est la position que les autorités de Pékin ont adoptée ces derniers mois, alors que les intérêts chinois en Afrique étaient cibles de plusieurs incidents, et qu'elles ont répétée cette semaine après une attaque en Ethiopie qui a fait 77 morts, dont neuf Chinois travaillant pour la filiale du géant pétrolier.
"La Chine soutient l'investissement et le commerce transnational avec les autres pays, dont ceux d'Afrique. C'est notre politique établie et elle ne changera pas", a réaffirmé jeudi le porte-parole des Affaires étrangères, Liu Jianchao.
Le gouvernement chinois ne veut pas rompre avec sa politique consistant à encourager les compagnies chinoises à devenir "mondiales" et à partir à la conquête de matières premières.
"Les compagnies pétrolières publiques chinoises ont investi à travers l'Afrique subsaharienne afin d'assurer des ressources énergétiques pour l'économie en expansion rapide du géant asiatique. La Chine a investi massivement dans des pays membres de l'OPEC, comme l'Angola et le Nigeria", souligne le cabinet de recherches économiques Global Insight.
Fin 2005, la Chine était impliquée dans 27 projets pétroliers ou gaziers dans 14 pays africains, et ces investissements se sont encore accrus en 2006, année ayant vu les dirigeants chinois sillonner le continent avant d'accueillir un fastueux sommet sino-africain à Pékin.
L'an dernier les pétroliers de l'empire du milieu se sont vu attribuer une série de contrats de prospection ou d'exploitation, au Nigeria, au Kenya, en Angola notamment.
"Ils cherchent le prochain gros coup et seraient proches d'un accord au Tchad, pour y prospecter", commente Global Insight.
Et si l'aide massive chinoise à coups de prêts sans intérêt et d'investissements tous azimuts est devenue essentiel à l'Afrique, la Chine est elle aussi très dépendante du continent noir.
En 2005, elle en a ainsi fait venir 38,34 millions de tonnes de pétrole, soit 30% de ses importations totales.
Parmi ses dix premiers fournisseurs, figuraient le Soudan, le Congo, la Guinée Equatoriale et l'Angola, son deuxième fournisseur, avec 17,46 millions de tonnes, derrière l'Arabie Saoudite.
Dans ce contexte de dépendance économique mutuelle, les analystes ne croient pas que les événements en Ethiopie influencent les relations sino-africaines.
"Cela ne va pas affecter la coopération sino-africaine", affirme Wang Hongyi, chercheur à l'Institut des études internationales à Pékin.
"La Chine n'était pas spécialement visée, et d'autres compagnies étrangères en Afrique ont déjà subi cela", tient-il à souligner.
Certes, mais le pays qui entretenait autrefois des relations essentiellement militantes avec l'Afrique est aujourd'hui la quatrième économie de la planète.
"Il va falloir que les Chinois se fassent à l'idée qu'être une puissance mondiale a aussi des désavantages et fait de vous une cible", note Denny Roy, de l'Asia-Pacific Centre for Security Studies d'Honolulu.
"Cela va peut-être choquer certains Chinois" qui se sont "toujours considérés comme dans le camp des pays pauvres, ne pouvant être pris pour cible", relève-t-il.
(©AFP / 26 avril 2007 12h00)
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