Après le succès retentissant d'Air Sénégal International (ASI), le Maroc et le Sénégal viennent de poser un acte supplémentaire dans leur exceptionnelle coopération à travers la création d'une société maritime qui se chargera de la gestion de la liaison entre Dakar et Ziguinchor, la capitale de la Casamance (sud).
Montée sur le même schéma qu'ASI, la Société maritime de l'Atlantique (SOMAT) est dotée d'un capital de 1,5 milliard de F CFA, (100 F CFA=1,70 DH environ), détenu à raison de 51% par la Compagnie marocaine de navigation (COMANAV), 24,5 pc par le Conseil sénégalais des chargeurs (COSEC-public) et 24,5% par la société du port autonome de Dakar (PAD- public). "Avec l'entrée en service de la ligne maritime Dakar-Ziguinchor, c'est tout un processus de coopération maroco-sénégalaise qui est couronné de succès après les autres domaines dans lesquels ce modèle exemplaire de partenariat Sud-Sud a donné ses fruits", s'est réjoui l'ambassadeur du Maroc à Dakar, Moha Ouali Tagma. "Cette nouvelle réalisation augure de bonnes perspectives pour les autres axes de la coopération entre le Maroc et le Sénégal qui sont déjà en chantier", a-t-il déclaré à l'agence MAP. Et à l'image de la Royal Air Maroc (RAM) qui a été retenue par les autorités sénégalaises comme partenaire stratégique pour la création d'Air Sénégal International, de par la qualité de son management et la solidité de son expérience, la Comanav a été préférée à une vingtaine de sociétés étrangères qui ont proposé leur service pour la gestion de la desserte avec la Casamance, à l'arrêt depuis le naufrage du bateau mythique le "Joola" en septembre 2002, faisant officiellement 1.863 morts. "Lors de l'appel d'offres lancé par les autorités sénégalaises, la COMANAV a proposé un déficit de 1,5 milliard de F CFA par an dans la gestion de cette liaison là où les autres sociétés ont prévu 20 milliards", a indiqué le directeur général de la SOMAT, Noureddine Mellouki. Un capital de confiance inestimable existant déjà entre le Maroc et le Sénégal, les négociations avec la COMANAV n'ont pas mis beaucoup de temps pour aboutir à la signature de la convention de création de la SOMAT, lors de la dernière visite de S.M. le Roi Mohammed VI à Dakar en mars dernier. Dotée d'une mission de service public, la SOMAT reçoit une importante subvention annuelle de l'Etat sénégalais pour pouvoir proposer des tarifs abordables sur cette ligne qui revêt une grande sensibilité dans le pays et qui fait l'objet de plusieurs enjeux politiques et économiques. Le naufrage du Joola a, en effet, ajouté aux souffrances de la Casamance, séparé déjà du reste du Sénégal par la Gambie et qui pâtit d'un conflit armé qui dure depuis 1982 entre les forces gouvernementales et les rebelles du Mouvement des forces démocratique de Casamance (MFDC). "Après le succès de notre coopération dans le domaine de l'aérien, nous n'avons pas hésité à faire appel à l'expérience marocaine dans le transport maritime", a indiqué l'ambassadeur du Sénégal à Rabat, Ibou Ndiaye. "On peut penser que ce qu'on a déjà réussi avec Air Sénégal, on va le réussir avec la SOMAT", a ajouté M. Ndiaye dans un entretien téléphonique avec l'agence MAP. La liaison maritime Dakar-Ziguinchor sera assurée par le navire "Willis", affrété pour une année et demie par l'Etat sénégalais auprès de l'Indonésie pour un montant de 60 millions de F CFA par mois, en attendant la construction en Allemagne, dans moins de 24 mois, d'un nouveau bateau. La COMANAV a entrepris d'importants travaux de rénovation sur le Willis, arrivé à Casablanca dans un piteux état, pour son adaptation aux standards internationaux en matière de sécurité et de navigation. La compagnie marocaine a également transféré au Sénégal tout son savoir-faire et toute sa longue expérience dans les domaines de la réservation, de la billetterie et de l'exploitation pour permettre une gestion optimale du navire. Très attentive au volet sécurité sur une ligne où le naufrage du Joola hante encore les esprits, la COMANAV a fait appel aux dernières technologies en installant des radios balises reliées au satellite ainsi que des relais de communication permettant de joindre le navire à tout moment durant tout son trajet. Et pour éviter les surcharges, à l'origine entre autres du chavirement de son prédécesseur, le Willis dispose d'un système de pointage de billets qui se bloque automatiquement à 462 places. Les responsables marocains et sénégalais sont conscients qu'au-delà de son caractère social, cette liaison maritime participera aux efforts de désenclavement de la Casamance. La signature, l'année dernière, d'un accord de paix entre le gouvernement et le MFDC a fait naître de grands espoirs et un ambitieux programme de reconstruction de cette région, doté d'un budget de plusieurs dizaines de millions de dollars, a été mis en place. "Cette liaison maritime va répondre à l'impératif de désenclavement de la Casamance permettant ainsi le développement de cette région chère à tous les Sénégalais", souligne l'ambassadeur du Maroc. Un avis partagé par le Premier ministre sénégalais, Macky Sall qui a relevé que la reprise de cette ligne constituait la "première réponse" au désenclavement de la Casamance. "Nous vivons un grand jour, car à la suite de la tragédie du bateau le Joola, le Président de la République s'était engagé à acquérir un navire qui répond aux normes de sécurité et de confort", avait déclaré M. Sall en inspectant dernièrement le Willis au port de Dakar. |
Par Mohamed Touzani | MAP |
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