Les victimes de l’instabilité politique ne trouveront personne pour garantir leurs dommages. Les assureurs africains et leurs réassureurs, réunis à Dakar, ont décidé d’écarter de leur champ de compértence, ce domaine.
Les sociétés d’assurance ainsi que leurs réassureurs, toutes membres de la Fédération des sociétés de droit national africaines (Fanaf), réunies à Dakar durant trois jours, ont décidé de mettre en œuvre ce qu’elles ont appelé la clause Fanaf, dans la couverture des risques dans la zone. Hier, au siège de la Fédération sénégalaise des sociétés d’assurances (Fssa), le directeur de l’institution et son adjoint tenaient une conférence de presse en marge de la Xème réunion des marchés de la Fanaf. MM. Ibrahima Cissé et Amadou Seck ont tenu à annoncer que les sociétés africaines d’assurance ont «décidé de préciser la notion de risque politique et d’exclure celui-ci de leur domaine de couverture».
«Bien entendu», nuance, le président de la Fssa, M. Cissé, «le débat a été de savoir où commence le risque politique et où finit un mouvement d’humeur à caractère social à effets limités». L’assureur reconnaît que l’opérateur économique, dont l’investissement part en fumée à la suite de troubles dans un pays, ne devrait pas être handicapé dans son travail, mais le problème est que les réassureurs africains ne sont pas du tout disposés à suivre leurs cédantes, les compagnies d’assurance, dans leur volonté d’offrir la couverture la plus complète possible à leurs clients. Par ailleurs, explique Amadou Seck, le risque politique est du domaine public et ne peut être pris en charge par le secteur privé. En clair, dit-il, «dans notre code, des provisions légales font peser sur les Etats et leurs structures décentralisées, les communes et autres collectivités locales, la responsabilité des risques politiques».
Cette question demande donc, selon les deux spécialistes des assurances, une concertation entre les réassureurs africains, leurs cédantes et les pouvoir politiques, pour trouver des solutions qui éviteraient une prolifération des litiges. Pour montrer l’impossibilité qu’il y aurait à couvrir tous les risques politiques en l’état actuel de l’assurance dans les pays de la Fanaf, Mamadou Racine Bathily, le secrétaire général de la Fssa, indique que l’évaluation de la couverture des risques liés aux événements d’Abdijan est de 300 milliards de francs Cfa. «Or, les assureurs qui sont là-bas ont payé seulement 450 millions de francs, et ils commencent déjà à fuir». Car, ajoute-t-il, le volume du chiffre d’affaires des assurances des pays de la Fanaf est de 300 milliards de francs.
La conférence de presse d’hier a été l’occasion pour la Fssa de rendre public le rapport qu’elle a présenté à cette réunion des marchés. Les résultats du premier semestre de 2005 indiquent que l’activité de l’assurance au Sénégal est encore fortement tirée par l’Iart. Si la branche de l’assurance vie est en progression dans ce pays, elle reste encore très en-déçà de ses capacités. Les assureurs en sont conscients et les deux conférenciers d’hier, à la suite de Racine Bathily, pensent qu’il y a des voies à explorer pour encourager les Sénégalais à souscrire des assurances. Pour illustrer, Amadou Seck, à titre de comparaison, dira : «La Suisse a 4 millions d’actifs et 12 millions d’assurés, et le Sénégal, avec 4 millions d’actifs, parvient difficilement à réaliser 100 mille contrats d’assurance.» Mais il pense que les efforts que ses collègues et lui accomplissent peuvent leur permettre, dans un avenir proche, d’atteindre les 500 mille assurés.
Mohamed GUEYE (Le Quotidien)
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